
Lubero : un drame ADF impose terreur et paralyse Bapere
Depuis l’installation des terroristes islamistes de l’Allied Democratic Forces (ADF) dans le secteur de Bapere, une entité du territoire de Lubero au Nord-Kivu, la vie économique et sociale peine à reprendre. Les habitants, qui vivent essentiellement de l’agriculture, sont contraints d’abandonner leurs villages pour des raisons de sécurité. Ce jeudi 12 juin 2025 marque une année depuis que la population de cette zone vit ce calvaire.
Sous la conduite d’un combattant connu sous le nom d’Abuakasi, selon des sources locales, les ADF commettent massacres, viols, mutilations et pillages en toute impunité. Ils imposent leur loi à une population non violente qui ne présente aucune menace. Le chef du secteur de Bapere, Macaire Sivikunulwa, affirme qu’en une année, plus de 1800 personnes ont été tuées dans un périmètre déterminé, malgré la présence des FARDC et de l’armée ougandaise.
« En une année, nous avons à peu près 1850 victimes égorgées », déclare-t-il.
« À la suite de cette situation, plusieurs personnes se sont déjà déplacées dans des zones sécurisées. Loin des balles, ils vivent sans assistance, dans des conditions humanitaires dramatiques. »
Macaire Sivikunulwa précise que plus de 52 000 déplacés de guerre ont quitté les villages de six groupements. Tous ont abandonné leurs champs et leurs activités pour se regrouper dans des agglomérations relativement sécurisées telles que Mangurujipa, Kambau, Njiapanda et Byambwe.
« Ces déplacés vivent sans assistance pendant une année malgré nos cris, et c’est aberrant », déplore-t-il.
Santé et éducation à l’arrêt
La crise dépasse le bilan humain : elle a également ravagé les services sociaux de base. Sur les 12 aires de santé, 7 ont été fermées complètement. Plusieurs centres ont été vandalisés, pillés, détruits ou incendiés. Le système éducatif est également frappé de plein fouet : 13 écoles primaires et 9 écoles secondaires sont aujourd’hui fermées.
« Sur les 12 aires de santé, 7 ont fermé hermétiquement. Il n’y a que 5 qui fonctionnent, les autres ont été détruits, pillés et vandalisés. Nous avons 13 écoles primaires et 9 secondaires qui ont fermé. Donc presque toutes les écoles ne fonctionnent pas sauf celles qui existent dans des zones sécurisées », insiste-t-il.
Les activités minières prises pour cibles
Les ADF ne se limitent pas aux villages : ils prennent aussi pour cible les sites miniers. Plusieurs coopératives minières et exploitants n’ont plus accès aux zones d’extraction, désormais sous contrôle des rebelles. Certains ont même été exécutés en pleine activité. Le dernier massacre date de mercredi et jeudi derniers sur les sites miniers d’Angola 1 et Angola 2, où une trentaine d’exploitants ont été tués.
« Cela fait deux semaines que les FARDC et l’UPDF ont lancé des opérations contre les rebelles. Après la destruction d’un de leurs bastions à Ekenye, les ADF, dans leur fuite, se sont rabattus sur des civils installés dans un site minier. Les victimes ont été exécutées sommairement. Le bilan provisoire fait état de 35 à 36 morts, principalement des creuseurs artisanaux et des habitants retrouvés en pleine activité », relate Macaire Sivikunulwa, avec émotion.
Un appel à la survie
Face à cette tragédie, le chef du secteur lance un appel pressant aux populations encore présentes dans les zones à haut risque :
« Il est préférable, dans ce contexte d’opérations, que la population quitte les zones à haut risque. Entre mourir de faim et subir une exécution sommaire, il faut choisir la vie », conseille-t-il.
Malgré les efforts sécuritaires en cours, la situation demeure critique. Pour renforcer leur mainmise, les ADF entretiendraient même, selon une source de la société civile, une entente avec les rebelles du M23, garantissant à chacun le contrôle absolu de ses zones conquises.
Azarias Mokonzi