
Mendicité et prostitution à Beni : un fléau alimenté par la guerre ?
Depuis la résurgence des rebelles du M23 soutenus par le Rwanda au Nord-Kivu, la mendicité bat son plein dans la ville de Beni. Cette situation est suivie par la prostitution de survie pratiquée par les femmes déplacées de guerre vivant dans cette région menacée par le terrorisme.
Dans un entretien avec toi Tazamardc.net, ce mercredi 20 novembre 2024, Madame Estimé Nekopole, responsable du service des affaires humanitaires dans la zone, affirme que ces enfants et ces femmes plongées dans ce phénomène sont des déplacés de guerre ayant fui les hostilités des rebelles du M23 à Kanyabayonga. Vivant dans des familles d’accueil et sans assistance humanitaire, ces enfants sont exposés à une vie de mendicité pour survivre, tout comme ces femmes.
Les conflits armés et le manque d’encadrement
Cette situation alarmante, exacerbée par les conflits armés et l’afflux de déplacés, soulève des questions sur l’assistance sociale et la protection des plus vulnérables. Le manque d’assistance adéquate et la surpopulation engendrée par les personnes déplacées par la guerre sont des facteurs déterminants qui poussent de nombreuses femmes à se tourner vers la prostitution pour survivre.
« La mendicité et la prostitution sont dues au manque d’assistance. Nous essayons de mener des plaidoyers à tous les niveaux, mais il y a aussi la surpopulation. Les déplacés sont là, ils ne sont pas vraiment encadrés ni assistés, et cela pousse les femmes à se livrer à la prostitution de survie, tandis que les enfants vont mendier. Nous avons déjà recensé plus de 3 250 enfants dans les institutions et établissements publics, et nous continuons à mener d’autres suivis dans chaque quartier et commune pour répertorier ces enfants ainsi que leurs familles afin de voir comment les réinsérer. Pour les femmes en situation de prostitution de survie, nous travaillons avec les services de genre et d’autres partenaires pour les aider, car la plupart sont non seulement traumatisées, mais vivent aussi dans la pauvreté », a-t-elle déclaré. Elle a déploré l’utilisation par certaines familles de ces enfants pour contribuer à leur survie.
Outre l’encadrement au niveau local, Estimé Nekopole précise que des plaidoyers sont menés au niveau du gouvernement pour encadrer correctement ces personnes vulnérables, bien que ces démarches restent souvent lettres mortes. « Les plaidoyers existent, mais ils restent souvent sans effet au niveau national. La plupart des enfants viennent de Kanyabayonga et de Cantine », a-t-elle ajouté.
Des maladies qui les exposent
Ces femmes sont exposées à toutes sortes de maladies et d’infections dans ce contexte de vulnérabilité, rappelle-t-elle. Face à cette crise humanitaire, des initiatives de sensibilisation sont mises en place par des organisations locales. La représentante de la division des affaires humanitaires souligne que ces efforts visent à informer et éduquer la population sur les dangers associés à la prostitution. Cependant, elle admet que les succès de ces actions sont limités face à l’ampleur du problème. « Nous déplorons cette situation », a-t-elle dit.
Cette femme lance également un appel pressant aux parents qui, par inaction ou désespoir, envoient leurs enfants dans les rues pour travailler. « Les dangers liés à la prostitution sont multiples et peuvent entraîner des conséquences graves, notamment sur la santé », avertit-elle. La lutte contre ces fléaux sociaux nécessite une mobilisation collective : gouvernement, ONG et communauté doivent unir leurs forces pour apporter un changement durable. Sans cela, Beni continuera d’être le reflet d’une crise humanitaire qui ne cesse de s’aggraver. Ce constat met en avant l’inefficacité des mesures prises jusqu’à présent pour répondre aux besoins urgents de cette population en détresse.
Azarias Mokonzi et Pascal Nduyiri