RDC : « Sans consensus interne, la paix restera une illusion »,(Mgr Nshole) - Tazama RDC
RDC : « Sans consensus interne, la paix restera une illusion »,(Mgr Nshole)

RDC : « Sans consensus interne, la paix restera une illusion »,(Mgr Nshole)

Alors que des pourparlers diplomatiques se multiplient à Doha, Washington et Lomé autour de la crise sécuritaire en République démocratique du Congo (RDC), des voix nationales s’élèvent pour en souligner les limites. L’une des plus écoutées, celle de Mgr Donatien Nshole, secrétaire général de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), appelle à ne pas négliger les véritables fondations d’une paix durable : la réconciliation interne, le dialogue inclusif et la justice.

« Ces pourparlers ne prennent pas en compte les défis internes, qui sont aussi fondamentaux. On peut trouver une solution de gauche à droite, mais s’il n’y a pas de consensus interne, demain il y aura d’autres groupes armés », a-t-il averti.

Depuis plusieurs mois, Kinshasa s’engage dans des efforts diplomatiques soutenus, avec la bénédiction des puissances occidentales et de certains États africains. Le gouvernement espère parvenir à un accord global qui inclurait notamment le Rwanda, régulièrement accusé de soutenir le M23, ainsi que d’autres acteurs non étatiques.

Mais pour Mgr Nshole, cette paix « technocratique » pourrait être illusoire si elle n’est pas portée par les Congolais eux-mêmes. Il rappelle que « la paix ne s’importe pas comme un bien de consommation : elle se construit dans les cœurs, dans les institutions et dans les villages ».

L’argument du prélat repose sur un constat implacable : les racines du conflit armé sont également internes. L’exclusion politique, l’impunité, les frustrations communautaires, l’instrumentalisation de l’armée et l’abandon des régions périphériques créent un climat propice à la prolifération des milices.

« Tant que les populations ne seront pas écoutées, tant que les victimes ne seront pas reconnues, on entretiendra le feu sous la cendre », insiste-t-il.

Le GEC recense aujourd’hui plus de 120 groupes armés actifs dans l’Est du pays. À cela s’ajoutent les tensions ethniques, la corruption endémique et l’inefficacité de l’appareil judiciaire. Pour Nshole, une solution extérieure qui ne traiterait pas ces causes endogènes ne ferait que « repousser l’échéance de la prochaine tragédie ».

Dans un contexte politique tendu, entre polarisation institutionnelle et méfiance de la population envers les dirigeants, le message de la CENCO résonne comme une proposition de sortie de crise : un dialogue intercongolais renouvelé, élargi à la société civile, aux communautés locales et aux forces vives du pays.

« Nous devons cesser de faire semblant d’écouter. La paix est un processus exigeant, qui demande courage, vérité et transparence », martèle Mgr Nshole.

Certains acteurs politiques, tout en saluant les efforts internationaux, reconnaissent en privé qu’aucune paix durable ne sera possible sans l’implication active des Congolais dans toutes les strates de la société.

Il ne s’agit pas, selon l’Église catholique, de rejeter les efforts extérieurs. Mais plutôt de les arrimer à une dynamique interne sincère. « Le soutien international est utile, mais il doit renforcer les capacités internes de médiation, et non se substituer à elles », conclut Nshole.

L’intervention de Mgr Nshole n’est pas un simple avertissement : elle constitue une boussole morale et politique pour un pays à la croisée des chemins. Si les négociations internationales sont une étape nécessaire, elles ne peuvent remplacer un véritable projet congolais de paix. Un projet ancré dans la justice, la mémoire, la vérité et la participation citoyenne.

Rédaction

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