
Quel risque court la RDC en cas de changement de la constitution ?
L’expert en relations internationales et chercheur en droit public international, Jimmy Kighoma, a présenté, au cours d’une interview accordée ce vendredi 15 novembre 2024 à Tazamardc.net, les risques que le pays encourt en cas de changement de la constitution en République Démocratique du Congo. Au-delà de légitimer la rébellion de Nanga, cette option de changement de la constitution risque de diviser la population entre l’Est et l’Ouest, a affirmé notre source, qui précise que cette même stratégie pourrait ouvrir la voie à une balkanisation.
Il ajoute que ce changement constituerait un coup d’État constitutionnel, ce qui pourrait, par ricochet, mener à la dissolution des institutions, ce qu’il ne souhaite pas. « Si la situation actuelle du pays est une aubaine pour nous, acceptons alors de changer la constitution. Ce message risque de diviser inutilement la population entre l’Est et l’Ouest. Il faut dire au chef de l’État que cette option est dangereuse. Comment comprendre qu’à l’Ouest, le changement constitutionnel soit une priorité et qu’à l’Est, la sécurité le soit ? La RDC est un corps, et pour le soigner, les médicaments doivent être adaptés à la maladie. Ce message de l’UDPS risque de créer une fissure de cohésion entre le peuple, dont une partie voit des priorités ailleurs et l’autre se sent sacrifiée. Cette mobilisation doit se faire contre Kagame, qui ne doit pas profiter de notre malheur. La guerre doit finir, et c’est ça l’urgence ; ce changement risque de légitimer les bêtises de Nanga. On ne change pas une constitution en temps de guerre, à moins qu’on nous dise autre chose. Nous avons la guerre contre le M23 et les ADF, et nous ne devons pas négliger ces menaces », a précisé Jimmy Kighoma.
Selon lui, la meilleure façon pour le président Tshisekedi de conserver le pouvoir est de chercher son dauphin. Il met en garde contre tous ceux qui importuneraient le peuple avec le discours du changement constitutionnel, en ignorant l’essentiel. En appelant la population à éviter toute naïveté face à la manœuvre politicienne, Jimmy Kighoma encourage le peuple à réserver le sort à tout porteur de ce message selon les normes légales, afin d’éviter de faire de lui un marchepied pour des décisions impopulaires.
« Ne venez pas avec le message de changement de la constitution. Nous ne voulons pas d’une nouvelle manipulation du peuple, comme cela avait été le cas lors de la campagne électorale en 2023. Tout ce que nous attendons du président de la République, c’est qu’il améliore le quotidien du peuple. Nous souhaitons que la crise soit apaisée et non exacerbée. Il y a une manière honorable de quitter le pouvoir. Ceux qui mangent, boivent et savourent, en ignorant que nous souffrons, doivent éviter de jouer avec le peuple. On doit leur rendre la monnaie de leur pièce. Si le peuple accepte ce changement, il sera naïf et méritera sa souffrance, car chaque peuple mérite ses dirigeants. S’ils viennent vous manipuler avec de l’argent, acceptez-le, mais dites-leur que nous n’avons pas besoin de modifier la constitution ; il y a tant de priorités. À quoi bon faire partie d’un peuple que tout le monde peut manipuler à sa guise ? », s’est interrogé Jimmy Kighoma.
Le débat sur le changement de la constitution continue à diviser la classe politique congolaise. L’opposition a lancé un sursaut national pour sensibiliser la population contre ce projet, qu’elle qualifie de « suicidaire ».
Azarias Mokonzi