
Guerre du M23 : Ronny Jackson accusé de travestir l’histoire des frontières RDC-Rwanda
Dans sa récente déclaration, le sénateur américain Ronny Jackson a révélé que le conflit à l’est de la République démocratique du Congo tire ses origines dans la complexité des limites territoriales, affirmant que l’est de la RDC faisait partie du Rwanda avant le redécoupage des frontières il y a de cela plusieurs années.
Cette déclaration controversée suscite des réactions bouleversantes au sein de la classe socio-politique congolaise. Bien que truffée par un discours mensonger sur les limites entre la République démocratique du Congo et le Rwanda, la révélation du sénateur américain sur la gouvernance et la sécurité soulève des révélations qui dictent la vérité et la réalité, a fait savoir ce jeudi 27 mars 2025 l’activiste du mouvement citoyen Lutte pour le Changement (LUCHA) Stewart Muhindo.
« Certains de ses propos sont vrais alors que d’autres sont faux. Quand il coiffe la corruption qui est présente au sein de l’élite politique à Kinshasa, c’est quelque chose de très vrai ; quand il coiffe notamment l’incapacité du gouvernement congolais à faire face au M23, c’est très vrai et même quand il explique que l’Est de la RDC est devenu une zone totalement abandonnée et que les pays comme le Rwanda, l’Ouganda et le Burundi se positionnent en minerais, ce sont des choses qui sont vraies. Par contre, quand il affirme que certaines terres ont précédemment appartenu au Rwanda, c’est très faux parce qu’il faut le rappeler, le Congo et le Rwanda, dans leurs formes actuelles, existent à partir de la conférence de Berlin de 1885. C’est à ce moment-là que les pays ont vu leurs frontières être tracées, et le Congo a commencé à exister comme le Rwanda, et c’est pendant cette période que le Nord-Kivu et le Sud-Kivu font partie de la RDC », a-t-il déclaré.
Stewart Muhindo rappelle que ces propos soutiennent le plan de la balkanisation et la rhétorique du Rwanda au sujet de ses frontières avec la RDC.
« Ce sont des propos qui rappellent un peu la rhétorique pour la balkanisation qu’ont toujours tenue les responsables du M23, notamment Bertrand Bisimwa, qui a récemment dit qu’on devait leur laisser ces terres. C’est dommage que les responsables politiques au niveau américain viennent au Congo non pas pour aider à une image vraie de la situation sur le terrain, mais pour la travestir et faire avancer les agendas des ennemis du Congo. Ça, c’est quand même très grave de la part de ce représentant américain, parce qu’il est historiquement prouvé que le Nord-Kivu et le Sud-Kivu n’ont jamais fait partie du Rwanda. Il faut arrêter de créer la confusion et de mentir, car cela contribue à attiser le conflit », souligne l’activiste.
Ronny Jackson a récemment indiqué que certaines communautés sont marginalisées par le gouvernement congolais au Nord-Kivu et au Sud-Kivu, alors qu’elles occupent des terres appartenant autrefois au Rwanda. Par contre, il a soutenu que ceux retrouvés en Ouganda, aussi un ancien territoire rwandais, sont facilement intégrés dans la communauté sans discrimination.
« Je crois comprendre que certaines personnes dans l’est de la RDC ne sont pas reconnues comme citoyens congolais, et peut-être pas, en partie, parce que c’était le Rwanda avant le redécoupage des frontières il y a de nombreuses années. Et, vous savez, cela faisait partie du Rwanda, mais je vous dirais qu’une grande partie de l’Ouganda était aussi le Rwanda. Après le redécoupage, qui est maintenant l’Ouganda, ces personnes ont été immédiatement assimilées et traitées comme des citoyens ougandais. Mais cela ne s’est pas produit en RDC, et je pense que c’est une partie du problème », avait-il expliqué.
Ces déclarations relancent le débat sur les ingérences étrangères dans les conflits dans l’Est de la RDC. Pour plusieurs observateurs, de tels propos, bien que déguisés en analyse géopolitique, risquent d’aggraver les tensions ethniques dans une région déjà marquée par des décennies de conflits armés. « Ce type de déclaration, surtout venant d’une personnalité de cette envergure, donne du crédit aux revendications des groupes rebelles et justifie indirectement leurs actions violentes », déplore un analyste politique basé à Goma.
Alors que la région des Grands Lacs reste instable, les voix se multiplient pour appeler les partenaires internationaux à plus de prudence dans leurs analyses et leurs déclarations. Beaucoup estiment que la paix passe par une reconnaissance objective des faits historiques, sans quoi les conflits risquent de perdurer. En attendant, la société civile congolaise continue d’exiger des clarifications officielles et des excuses pour ce qu’elle considère comme une tentative de réécriture de l’histoire.
Azarias Mokonzi